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Photo du rédacteurKarine Prost

Mémoire de tirs, ailleurs…

COUP DE COEUR

Fresque croisant les époques et les lieux, Brazza – Ouidah – Saint-Denis est une quête historique sur le sort dramatique réservé par l’Etat français aux tirailleurs dits « Sénégalais ». Un drame politique et humain mis en vie avec puissance et douceur. Impressionnant.


De l’obscurité. Des voix. Une lumière chaude qui se lève sur une scénographie épurée faite de toiles polymorphes. Et Melika, qui découvre soudain que son grand-père a été tirailleur pendant la deuxième guerre mondiale. Son histoire croisera celle de Luz, jeune chercheuse éprise de vérité sur les pans opaques de cette même guerre, partie à Brazzaville pour en savoir plus sur le destin des tirailleurs de « l’Afrique française », engagés volontaires ou contraints pour se battre aux cotés de la France en 39-45.


Leurs parcours nous conduiront de Brazzaville à Ouidah, en passant par Paris. Et par Thiaroye, sinistre scène du massacre orchestré par l’armée française contre ses soldats de couleurs. Qui ne réclamaient que ce qui leur avait été promis. Et leur était dû. Elles nous feront rencontrer vétéran tirailleur, vieille prêtresse africaine, enfants de Brazza, enfants de Saint-Denis. Tous liés par le fil invisible d’une histoire commune. Mais passée sous silence.



Alice Carré met en lumières, au sens premier comme au sens figuré, cette histoire occultée. Avec tout à la fois puissance, précision et délicatesse. La scénographie, comme un tableau superbe qui se fait et se défait sans cesse, dessine les temps, les lieux, les drames. Des toiles tendues en fond de scène seront toiles de tente, archives, écran d’ombres portées ou autres façades. Jetées au sol, elles seront chemin poussiéreux ou fleuve traversant. Esthétique. Et efficace.


Les personnages s’incarnent dans les comédiens, en faisant fi des âges, des couleurs et des genres. Avec un talent rare. Petite nuance cependant sur l’articulation de certains comédiens qui, lorsqu’ils parlent de concert, sont par moment difficilement audibles en fond de salle.


Du Congo au Bénin, du Sénégal à la France, les époques et les lieux s’alternent, s’entrecroisent même parfois dans une même scène. Et tout semble à sa place. Lumières, musiques, jeu, mise en scène et texte s’unissent dans cette même quête de vérité et de réparation. Avec mansuétude. Et virtuosité.


Karine PROST - Avignon – 24 juillet 2023

Brazza – Ouidah – Saint-Denis

Avignon, Festival Off,

11 Gilgamesh – 18h25

Du 7 au 26 juillet ; relâche les 13 et 20 juillet

Auteure et Mise en scène : Alice Carré

Interprétation : Loup Balthazar, Claire Boust, Eliott Lerner, Josué Ndofusu, Kaïnana Ramadani, Basile Yawanke

Photo ©Jérémie Levy

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